Ce 7 mars 2025 marque un tournant politique en Haïti : la fin du mandat de Lesly Voltaire à la présidence du Conseil présidentiel de transition (CPT) et l’accession de Fritz Jean, issu de l’accord de Montana, à la tête du pays. Dans un contexte où l’État est fragilisé par une insécurité omniprésente, une misère grandissante et des rivalités politiques exacerbées, ce changement suscite autant d’espoir que d’appréhensions.
Depuis plusieurs années, Haïti s’enfonce dans une spirale infernale. Les gangs armés, devenus des acteurs centraux du paysage sociopolitique, imposent leur loi avec une brutalité effrayante. Meurtres, kidnappings, pillages : chaque jour, la population haïtienne vit dans l’angoisse d’un lendemain incertain. L’État, déstructuré et corrompu, peine à imposer son autorité, tandis que les solutions politiques s’enlisent dans des négociations stériles, souvent influencées par des intérêts extérieurs.
Dans ce climat délétère, l’arrivée de Fritz Jean suscite des interrogations. Peut-il réellement incarner une rupture avec les échecs du passé ? Son engagement dans l’accord de Montana lui confère une certaine légitimité, mais suffira-t-il à reconstruire un pays à genoux ? Les défis qu’il devra affronter sont titanesques : sécuriser la capitale et les provinces, restaurer l’autorité de l’État, rétablir la confiance du peuple et amorcer une transition vers un gouvernement stable et légitime.
Un pouvoir sous influence ?
L’un des principaux obstacles auxquels Fritz Jean sera confronté est la question de l’ingérence étrangère. Depuis des décennies, Haïti est le théâtre d’une lutte d’influence où s’entremêlent les intérêts des grandes puissances, des élites locales et des acteurs économiques criminels. L’ombre des États-Unis, de la France et du Canada plane sur chaque décision politique, tandis que des bourgeois véreux continuent d’alimenter le chaos pour préserver leurs privilèges.
Dans ce contexte, Fritz Jean pourra-t-il réellement exercer son pouvoir en toute indépendance ? Ou sera-t-il, comme tant d’autres avant lui, prisonnier d’un jeu où il ne sera qu’un pion ? La population haïtienne, quant à elle, reste lucide : elle a trop souvent vu défiler des dirigeants promettant le changement, mais finissant par céder aux compromis et à l’inaction.
Une transition ou une impasse ?
Depuis la chute de Jovenel Moïse en 2021, Haïti est plongé dans un interminable cycle de transition. Chaque tentative de restructuration politique semble vouée à l’échec, chaque nouvelle équipe dirigeante se heurte aux mêmes blocages. La question fondamentale reste donc entière : cette transition peut-elle réellement déboucher sur un renouveau démocratique et institutionnel, ou n’est-elle qu’un prolongement d’un marasme déjà inscrit dans l’ADN politique du pays ?
Les mois à venir seront décisifs. Fritz Jean a l’opportunité d’amorcer un véritable changement, mais il devra faire face à des forces qui n’ont aucun intérêt à voir Haïti se redresser. L’histoire récente nous enseigne qu’en l’absence d’un sursaut collectif, d’une mobilisation citoyenne et d’une vision claire pour l’avenir, toute tentative de réforme risque d’être vaine.
Le peuple haïtien est fatigué des promesses non tenues, des illusions politiques et des éternels recommencements. Cette transition sera-t-elle différente ? Ou assisterons-nous, une fois de plus, à la simple reconduction d’un système qui broie toute velléité de changement ? Seul l’avenir nous le dira.
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Jacques Adler Jean Pierre